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Une trousse de secours contre le cyberharcèlement: “On ne se fait pas tabasser par des hologrammes. La violence se passe dans la vraie vie”


La semaine dernière, elle présentait son nouveau livre, Cyberharcelée*, sur le campus de Louvain-la-Neuve, à la librairie indépendante La Page d’Après qui a récemment ouvert dans la ville universitaire.

Florence Hainaut présente "Cyberharcelée" à la librairie La Page d'Après, à Louvain-la-Neuve.
Florence Hainaut présente “Cyberharcelée” à la librairie La Page d’Après, à Louvain-la-Neuve. ©An. H.

”C’est beaucoup plus large et ça va beaucoup plus loin que les insultes et les menaces. Pour se protéger, à un moment les femmes n’ont plus d’autre choix : elles se coupent des réseaux sociaux et se retirent, petit à petit, du débat démocratique, en ligne comme hors ligne”, constate Florence Hainaut.

“Le sexisme, en ligne et hors ligne, fait taire trop de femmes”

Non, il ne suffit pas de refermer son ordi…

”Ce n’est pas une violence qui s’exerce sur internet mais via internet”, insiste l’auteure. “Le terme cyber donne une image fausse, comme si cette violence était évanescente et qu’on se faisait tabasser par des hologrammes”. Combien de fois n’a-t-elle pas entendu qu’il suffisait de refermer son ordi… “Internet, ce n’est pas le lieu où elle s’exerce, c’est le moyen pour l’exercer, c’est l’outil pour harceler, insulter, diffamer. Mais ça se passe dans la vraie vie”. D’ailleurs, compare-t-elle, quand on reçoit du courrier menaçant dans la boîte aux lettres, on n’est pas “boîte-aux-lettres-harcelée” ou quand on est harcelé sur son portable, on n’est pas “téléphone-harcelée”. “On est harcelées, un point, c’est tout”.

Un verbe qui se conjugue surtout au féminin. Florence Hainaut a compulsé les études, internationales et nationales, assez récentes, sur la cyberviolence. Si on les croise, un constat s’impose : les victimes en sont d’abord, et en grande majorité, des femmes. Exemple : une enquête publiée en mars 2021 en ligne sur The Economist Intelligence Unit montre que 85 % des filles et des femmes connectées à Internet sont touchées par le phénomène, qu’elles soient directement visées, témoins ou spectatrices. Une étude française, qui date de décembre 2022, ajoute que 84 % des victimes de cyberviolence sont des femmes.

#SalePute, arme de politisation sensible

La cyberviolence fait des dégâts incommensurables

En Belgique aussi, les femmes sont les premières à trinquer. Selon une étude sur le sexisme publiée par l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes (IEFH) en 2022, les femmes sont cinq fois plus susceptibles que les hommes de subir des pressions pour qu’elles envoient une photo d’elles nues. Une autre enquête de l’IEFH, en collaboration avec l’Université d’Anvers, qui a pris l’avis des jeunes sur le cyberflashing et la possession d’images dénudées sans consentement, montre qu’en Belgique, une fille (entre 15 et 25 ans) sur deux a déjà reçu un dickpic (une photo de pénis).

Lancement d’une étude sur le harcèlement dans toutes les universités et hautes écoles

La cyberviolence fait des dégâts incommensurables : 88 % des victimes souffrent ou ont souffert de troubles anxieux et dépressifs, selon l’étude française citée plus haut. Les recherches mettent en évidence des problèmes de stress, d’anxiété, de concentration, et parfois des crises de panique. Entre autres.

Des clés pour se protéger

Comment faire face quand des tombereaux de messages insultants et d’injures misogynes se déversent sur vos comptes Twitter (dont le nouveau nom est X), Instagram ou Facebook ? Comment se prémunir contre les assaillants du net qui traquent leurs victimes jusqu’à les acculer à jeter l’éponge et quitter le ring des réseaux ?

Dans Cyberharcelée, après avoir donné les codes pour comprendre le fonctionnement du harcèlement misogyne en ligne, Florence Hainaut donne des clés pour s’en protéger, s’en défendre ou s’en remettre. “Ce livre est une trousse de premiers soins, puis une réserve de munitions”, image Myriam Leroy.

“Les yeux rouges” ou l’effroyable comédie contemporaine du harcèlement

Une boîte à outils en 10 étapes pour comprendre et lutter (selon le sous-titre), déclinées avec un humour parfois féroce. On y apprend comment paramétrer sa confidentialité, laisser le moins d’informations possible, repérer les logiciels espions, signaler des contenus, bloquer les auteurs, porter plainte (ou pas)…

”J’ai écrit ce livre pour que vous compreniez que vous n’y êtes pour rien”, conclut l’auteure. “Pour que vous ne soyez plus seule et que vous n’ayez plus honte. […] Et pour que vous compreniez que si on vous dit que vous l’avez bien cherché, on vous ment.”

*Cyberharcelée, Éditions De Boeck Supérieur, 208 pp., 14,90 €



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Written by elitebrussels

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