Sur le plan comptable, cette croissance ne pallie pas la chute du nombre de baptêmes d’enfants, ni du nombre de débaptisations. En effet, entre 2023 et 2016, le nombre de baptêmes d’enfants est passé de 50 867 à 34 826 par an (soit une dégringolade de plus de 30 %). Quant aux débaptisations, 14 251 personnes avaient demandé d’être radiées du registre des baptêmes en 2023.
En la matière, néanmoins, les chiffres ne disent pas tout, tant le parcours d’un catéchumène est engageant (et demande de nombreuses soirées de découverte de la foi pendant un an ou deux, et plusieurs célébrations). Si cette tendance est donc difficile à qualifier, elle ne semble pas anodine au vu de la diversité des profils qui se présentent aux portes des paroisses. “À mon sens, ce n’est donc pas un épiphénomène, car il est constant ces dernières années, et il n’y a pas de raison qu’il baisse”, note Arnaud Join-Lambert, professeur de théologie à l’UCLouvain.
Nombre de prêtres, de fidèles, de baptêmes… l’Église catholique présente des statistiques à la baisse, mais ne se décourage pas
Des parcours singuliers
La Belgique n’est d’ailleurs pas la seule à partager de telles données. En Angleterre, une étude de l’agence Yougov et de la Bible Society témoignait, ce 8 avril, d’un regain de la pratique religieuse catholique, plutôt qu’anglicane. En France également, les chiffres de baptêmes d’adultes ne cessent d’interpeller depuis plusieurs années. Ce week-end, plus de 10 000 adultes (+ 45 % par rapport à 2024) et 7 400 adolescents (+ 33 %) y seront en effet baptisés. Là aussi, les profils sont variés, plus jeunes que par le passé et issus des diocèses urbains et ruraux.
L’institution manque de recul et d’étude pour comprendre le pourquoi de ces demandes. “On peut imaginer qu’il s’agit pour partie d’un rattrapage de la chute importante des baptêmes d’enfants”, poursuit Arnaud Join-Lambert. Mais ce n’est qu’un élément explicatif. Ce regain s’inscrit également dans une recherche de sens, de repères et d’intériorité plus large, qui touche l’ensemble de la société, comme le constatent de nombreux sociologues. Différentes rencontres, menées par La Libre l’an dernier, témoignaient par ailleurs de parcours très singuliers : certains s’étaient tournés vers l’Église à l’occasion d’une épreuve, grâce à une rencontre, d’autres disaient avoir été émerveillés par une liturgie ou la beauté d’une église qui les avaient “ouverts à Dieu” ; un étudiant de Louvain-la-Neuve avait été marqué par les textes issus des différents conciles et leur portée théologique et philosophique…
Comment expliquer le nombre record de baptêmes d’adultes ce week-end? “Il semble que la question de la foi n’est plus un sujet tabou”
“Ne pas crier cocorico trop vite”
En Belgique comme en France, ce phénomène étonne d’autant plus l’institution qu’il n’est pas le fruit d’une stratégie d’évangélisation spécifique, menée ces dernières années. Néanmoins, le futur président de la Conférence des évêques de France, le cardinal Jean-Marc Aveline, a invité ce 3 avril à “ne pas crier cocorico trop vite”. Il insistait sur l’accueil que devront réserver les paroisses de France à ces nouveaux venus. En effet, s’il n’existe pas de chiffres en la matière, de nombreux adultes se montrent moins assidus à la messe deux ans après leur baptême. Cela témoigne aussi de la “fluidité des appartenances” (on passe plus facilement d’une spiritualité à l’autre) qui marque les religions contemporaines, conclut Arnaud Join-Lambert.