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Un tribunal a condamné l’Église qui avait refusé à une femme la formation au diaconat. Et le principe de la séparation de l’Église et de l’État ?



La Libre Belgique du 26 juin nous rapporte un jugement dont l’originalité ne manque pas de surprendre. Il ravit certainement les féministes du “Comité de la jupe” mais “fait mauvais genre” – si l’on ose utiliser en l’occurrence l’expression ! – dans les milieux ecclésiaux. Un tribunal vient, en effet, de condamner l’archevêque actuel de Belgique et son prédécesseur à payer des dommages-intérêts à une demanderesse à laquelle une inscription à la formation au diaconat avait été (deux fois) refusée en raison de son sexe. La sacro-sainte sanction de la “discrimination” divise les opinions une fois de plus, au lieu de les rapprocher !

L’Église catholique en Belgique est jugée coupable de discrimination envers une femme exclue de la formation de diacre

Laissons aux juristes – et sans doute aux juges d’appel et à ceux des instances supérieures – le soin de trancher la question. Ceci n’empêche toutefois personne d’y réfléchir.

La jurisprudence, on le sait, est unanime : la règle de l’égalité des hommes et des femmes, ainsi que celle de la non-discrimination entre eux impliquent que tous ceux et celles qui se trouvent dans la même situation soient traités de la même manière. Cependant, ceci n’exclut nullement qu’une distinction soit faite entre différentes catégories de personnes, pour autant que son critère soit susceptible de “justification objective et raisonnable” en regard du but poursuivi.

Règle constitutionnelle

En l’espèce, les juges ont bien vu que le droit à la formation réclamé par la demanderesse laisse intacte la règle constitutionnelle interdisant à l’État d’intervenir dans la nomination et dans l’installation d’un ministre du culte. Selon le droit canon, le choix d’un diacre (ou d’un prêtre) nécessite un appel de l’évêque diocésain ; autrement dit, l’obtention d’un certificat d’études ou d’un diplôme ne confère d’office aucun droit à l’ordination.

C’est donc la notion même de “formation” qui apparaît de prime abord au cœur du débat.

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Le formateur enseigne la théorie, mais aussi la pratique ; il pousse à la réflexion, il guide et conseille, il évalue plus encore que l’enseignant car son éducation est, non seulement intellectuelle, mais aussi morale.

Le terme indique suffisamment qu’il s’agit d’autre chose que d’un simple enseignement, même préparatoire. “Enseigner” revient étymologiquement à signaler, à montrer, à instruire, de manière que l’élève ou l’étudiant apprenne. “Former” quelqu’un ou se former soi-même requiert un programme plus complet, plus ambitieux. Le but poursuivi est ici de préparer à tous égards à une mission imminente. Le formateur enseigne la théorie, mais aussi la pratique ; il pousse à la réflexion, il guide et conseille, il évalue plus encore que l’enseignant car son éducation est, non seulement intellectuelle, mais aussi morale. Il s’agit d’aider le séminariste à devenir un candidat au diaconat ou au sacerdoce, de lui transmettre à cette fin le savoir et l’expérience, mais aussi de favoriser les qualités d’ouverture, de dévouement et de spiritualité qui pourraient faire de lui un apôtre missionnaire. Cette formation exceptionnelle est à la fois humaine, psychologique, philosophique et théologique ; comme telle, elle est longue et chronophage, nécessitant autant d’application de la part de celui qui la suit que de celui qui la dispense. Comme tout ce qui est précieux, elle ne se brade pas ! L’origine du mot “séminaire” le prouve, c’est un lieu où l’on fait croître une semence pour qu’elle devienne pépinière…

Statut particulier

Les ministres du culte (tout comme, par exemple, les magistrats) jouissent en Belgique d’un statut particulier. L’accès à un ministère ecclésiastique et, partant, à la formation préparatoire ne peut donc être assimilé à l’accès ni à tout autre emploi ou fonction ni à n’importe quelle étude. Or, le principe de la séparation de l’Église et de l’État vaut dans les deux sens ; il interdit à chacun des deux de s’immiscer dans les prérogatives de l’autre ! L’Église ayant l’incontestable obligation de choisir ses prêtres et diacres avec prudence et discernement, comment l’État pourrait-il “raisonnablement” lui contester le droit d’établir ses propres critères ? D’une part, ceux-ci relèvent de la théologie dont la compétence échappe totalement à l’État ; d’autre part, ils sont directement fonction du but poursuivi, puisque, selon la tradition de la foi catholique, les prêtres et diacres sont chargés, non seulement de la transmission (par la parole et l’exemple) des messages évangélique et ecclésial, mais encore et surtout de la célébration des sacrements “in persona Christi”, soit comme substitut de Jésus, “vrai Dieu et vrai homme”, soit un être masculin. Or, il se fait qu’une femme n’est ni meilleure ni pire qu’un homme, qu’elle lui est semblable et équivalente (elle a la même valeur), qu’ils se complètent mutuellement mais qu’elle est différente et… qu’elle n’est donc pas un homme.

Des femmes diacres? Ce n’est pas pour demain, tranche le Vatican

Aussi peut-il sembler douteux, de prime abord, que les juges soient en mesure de contrôler l’Église en ce qu’elle entend interdire aux femmes l’exercice de certains ministères ordonnés et, partant, les exclure des “formations” spécifiques.

Rien n’empêche toutefois les femmes et jeunes filles qui le souhaitent de suivre – comme les hommes – une partie des cours professés au centre diocésain à l’intention des séminaristes et des candidats au diaconat permanent. Voici qui leur permet de développer leur spiritualité, de se mettre comme laïques au service de la pastorale voire d’être appelées à un ministère institué. Qualifiés parfois à tort de “formations”, ces enseignements sont bénéfiques, puisqu’ils visent à un approfondissement salutaire des connaissances religieuses dans une société qui tend hélas à les oublier….



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Written by elitebrussels

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